Un tournant dans l'histoire du sport automobile

11 juin 1955 : l'enfer du Mans

Il y a 70 ans, la course des 24 Heures du Mans était le théâtre du plus grave accident de l'histoire du sport automobile. En quelques secondes, 83 spectateurs ont perdu la vie et plus de 120 personnes ont été blessées. Cet événement a bouleversé le monde du sport automobile.

Publié le 13.06.2025

Certaines images sont si terribles qu'elles restent gravées dans la mémoire collective. C'est le cas du terrible accident survenu le 11 juin 1955 lors des 24 Heures du Mans. À l'époque déjà, cette course était un événement majeur qui attirait 250 000 spectateurs.

Après le départ typique du Mans, où les pilotes doivent sprinter sur la piste pour rejoindre leurs voitures alignées devant la voie des stands, la course a démarré à 16 heures pile. Mike Hawthorn, au volant d'une Jaguar D-Type, était en tête. Le pilote britannique était célèbre pour toujours porter un nœud papillon et une chemise blanche dans le cockpit.

C'est ainsi que le malheur a commencé

L'accident s'est produit peu après 18 heures, au 35e tour de la course. Mike Hawthorn, qui avait doublé la Austin-Healey de Lance Macklin dans la ligne droite de départ, a brusquement freiné et s'est engagé dans la voie des stands, qui se trouvait alors au bord de la piste. Macklin a réussi à l'éviter pour éviter une collision. Mais il s'est alors retrouvé sur la trajectoire de la Mercedes-Benz 300 SLR de Pierre Levegh, qui arrivait à toute vitesse par derrière.

Levegh n'avait plus aucune chance d'éviter la collision. Sa Mercedes a percuté l'arrière de l'Austin-Healey sans freiner, a décollé et a été catapultée comme un projectile en direction des tribunes. Sous le choc, la Mercedes s'est brisée en morceaux : le bloc moteur et des parties de l'essieu avant ont été projetés dans la foule, la structure en magnésium a pris feu. Levegh lui-même fut éjecté de la voiture et mourut sur le coup. En quelques secondes, 83 autres spectateurs perdirent la vie et 120 furent blessés, certains gravement.

Malgré l'accident, la course ne fut pas interrompue. Les organisateurs craignaient qu'une évacuation ne provoque une panique générale. Et le responsable de l'accident, Mike Hawthorn, remporta cette course fatidique.

Mercedes s'est retirée volontairement de la course après minuit et a mis fin avec effet immédiat à ses activités de course automobile jusqu'en 1989. Certes, la fin de son engagement dans le sport automobile était déjà décidée depuis des mois, mais la tragédie n'a fait qu'accélérer le processus.

Comment cela a-t-il pu arriver ?

Plusieurs facteurs ont contribué à la catastrophe. D'une part, le circuit du Mans était obsolète et n'était pas conçu pour les vitesses élevées des voitures de sport de l'époque. Il n'y avait ni barrières ni zones de sécurité entre la piste et les tribunes. D'autre part, les stands étaient très proches les uns des autres, sans séparation avec la piste, ce qui augmentait le risque d'accident. C'est donc la combinaison de la vitesse élevée, de la sécurité insuffisante du circuit et du comportement des pilotes impliqués qui a conduit à la catastrophe.

Un choc mondial

La tragédie a provoqué un choc mondial, mais aussi un activisme excessif. De nombreux pays, dont la France, l'Allemagne, l'Espagne et la Suisse, ont dans un premier temps suspendu les courses. Alors que la plupart des pays ont autorisé la reprise des Grands Prix sous certaines conditions de sécurité, l'interdiction des courses automobiles sur circuit restait en vigueur en Suisse jusqu'en 2022. Lors de la révision de la loi sur la circulation routière, le Conseil national et le Conseil des États ont levé l'interdiction obsolète des courses sur circuit.

Un tournant dans le sport automobile

L'accident a également entraîné des changements fondamentaux dans le sport automobile, notamment en matière de sécurité. Au cours des années suivantes, de nombreux circuits ont été profondément modernisés, avec des zones de dégagement plus larges, des stands séparés et une plus grande distance entre les spectateurs et la piste. Les voitures de course ont été rendues plus sûres, notamment grâce à des habitacles plus stables, des matériaux ignifugés et des carrosseries mieux conçues. De plus, le port du casque et des vêtements ignifugés a été progressivement introduit et normalisé pour les pilotes. Cela n'a toutefois amélioré la situation que de façon marginale. Jusque dans les années 1980, les pilotes mouraient comme des mouches sur leur visière.

Mémorial pour le progrès

L'accident du Mans en 1955 marque un tournant tragique dans l'histoire du sport automobile. Mais il a également entraîné une évolution indispensable des normes de sécurité, du moins dans une certaine mesure. Aujourd'hui encore, le grave accident du Mans en 1955 rappelle que les progrès technologiques dans le sport automobile ne doivent jamais se faire au détriment de la sécurité des pilotes et des spectateurs.

Texte : Jürg Zentner

Photos : archives Mercedes-Benz

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